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Rencontre avec Marion Fritsch, marraine du Concours de Poésie

Léa.c

15 juil. 2025

Fragments d’une poète contemporaine.

Quand on parle de poésie, on pense souvent à Victor Hugo, Aragon, Eluard. Mais aujourd’hui, d'autres voix émergent et redonnent à la poésie sa force populaire et émotionnelle. Marion Fritsch, autrice et créatrice engagée, est l’une d’elles. Cette année, elle est la marraine du Concours de Poésie organisé par Culture Without Border. Nous avons échangé avec elle sur son parcours, sa vision de la poésie, et le sens qu’elle donne à l’écriture.



"Je crois que je ne me suis pas proclamée poète,
on m’a un peu baptisée comme telle."


Voilà comment Marion résume son parcours, avec cette lucidité désarmante et une humilité qui traverse tout son discours.


Une vocation née presque par hasard


Tout commence sur Instagram, avec Une livre une histoire, un compte de chroniques littéraires. Mais très vite, l’envie d’écrire prend plus de place. Elle s’inscrit alors à un DU en écriture créative à l’université de Cergy.


“Je suis arrivée un peu en touriste, je me suis retrouvée dans une classe avec des écrivains, des profs de lettres… On faisait des ateliers d’écriture, et là j’ai compris que j’adorais ça.”


Peu à peu, elle publie de courts textes en ligne, des “fragments”, comme elle les appelle, portés par l’émotion et la concision. “ J’écrivais des choses très courtes, qui tenaient sur les réseaux.  J’avais même mis ‘poète’ dans ma bio, pour rigoler.” Et pourtant, quelque chose opère. Les retours du public se multiplient. Un jour, son premier livre est publié… et rangé en rayon poésie.


“C’est les gens qui ont commencé à dire que c’était de la poésie. Moi j’aimais dire que c’était poétique. Et puis un jour, mon livre est sorti… Il a été rangé en rayon poésie. Là, je crois que j’ai été baptisée.”


Réinventer la poésie, la sortir de son entre-soi


La poésie selon Marion n’a rien d’intimidant. C’est une écriture du cœur, adressée à toutes et tous. Je lui demande ce qu’elle pense du rapport entre poésie et légitimité. Elle répond sans détour : “La poésie, c’est très élitiste, très entre-soi. Et moi, j’ai été un peu choisie par le peuple. Des gens qui ne lisaient pas de poésie se sont mis à en lire grâce à mes textes.”


Ce qui l’anime, c’est l’envie de dépoussiérer un genre trop souvent figé. “L’art, c’est réinventer ce qui existe déjà. En France, l’image de la poésie est un peu figée. À l’étranger, c’est plus libre, plus vivant. Il faut débrayer.”


L’émotion comme matière première


Qu'est ce que tu recherche quand tu écris ? Elle répond sans hésiter : l’émotion.



“L’écriture, c’est un espace.
Un espace où on te dit : tu peux écrire.
On va t’écouter. On va te lire.
Et ça, ça change tout.”


Son écriture est habitée par l’amour, le manque, les liens humains. Mais aussi par une conscience accrue de la valeur du travail créatif. Elle avoue aujourd’hui vouloir prendre plus de recul vis-à-vis des réseaux sociaux.


"Quand on commence, on est très galvanisé par les retours, les likes, les réactions. Mais à un moment, il faut apprendre à écrire sans attendre la validation immédiate. Apprendre à se détacher, à construire, à approfondir. C’est une autre forme de travail, plus exigeante, plus lente, mais essentielle."


Elle cherche désormais à écrire avec sincérité, sans se perdre dans le rythme imposé, et à retrouver un espace d’expression plus libre.


La transmission comme mission


En tant que marraine du concours, elle porte un message fort : la poésie est pour tous.

Qu'est ce que cela représente pour toi d'être marraine du Concours de Poésie 2025 ?


“Je suis très honorée d’être marraine. Je trouve ça magnifique de faire voyager la langue française à travers le monde, et de permettre à chacun de tenter sa chance.”


Elle insiste sur la valeur de la poésie chez les plus jeunes : “Il y a une naïveté dans leurs poèmes qui est très difficile à reproduire. Comme on dit : c’est très dur de dessiner comme un enfant. La poésie, c’est pareil.


Et quand je lui demande ce qu’elle aimerait transmettre, elle se confie sur un manque de repères dans son propre parcours. Elle espère devenir, pour d’autres, la figure qu’elle aurait aimé rencontrer. Une inspiration accessible et profondément ancrée dans son époque.



“Je n’ai pas forcément eu de modèle en poésie.
Mais j’espère qu’un jour, des jeunes se diront :
j’ai envie d’être comme elle.
Et ça, c’est tout ce que j’espère.”


Ce que la poésie peut encore faire


Avant de conclure, je lui pose une dernière question : est-ce que la poésie a encore un rôle à jouer aujourd’hui ? Sa réponse est claire : oui, mais autrement.


“Je crois que la poésie peut encore toucher les jeunes, mais il faut lui donner une nouvelle forme. L’imaginaire qu’on a de la poésie doit sortir de l’ombre, et des vieux manuels scolaires.


Elle travaille actuellement sur plusieurs projets d’écriture, avec en ligne de mire un récit centrée sur la jeunesse et les réalités du quotidien scolaire.


“Je veux ouvrir la voie, tendre la main. Il y a des gens talentueux qui l’ignorent encore. Il faut leur donner un espace pour se révéler.”


En un mot : vivante


Ce qui ressort de cette rencontre, c’est une voix libre, chaleureuse, profondément humaine. Une poésie vivante portée par l’envie de transmettre et de réveiller des émotions endormies.


La poésie, chez elle c'est une main tendue à celles et ceux qui n’osaient pas écrire, pas lire, pas dire. Et si elle a trouvé sa voix, c’est peut-être pour mieux aider les autres à trouver la leur.


C’est d’ailleurs tout le sens de son dernier projet : Écrire les saisons du cœur, un carnet d’écriture paru le 13 juin 2025 aux éditions Leduc. Conçu comme un atelier intime, le livre invite à écrire à partir de soi. À oser dire.


“J’ai compris alors une chose essentielle : tout le monde a une histoire à raconter. Tout le monde peut écrire un poème. Mais souvent, personne ne nous l’a dit.”


Avec ses textes, ses ateliers et ce carnet désormais entre les mains de ses lecteurs, Marion poursuit ce fil : celui qui relie l’intime à l’universel, la parole à l’écoute, l’émotion à l’action. Une poésie vivante, oui. Mais surtout contagieuse.

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